Sylvain Maillard, député du LREM, ancien centriste et également chef d’entreprise, relance l’idée d’une TVA sociale pour réindustrialiser la France. Cette vieille lune n’a pas fait l’unanimité, mais a déchiré le monde politique à plusieurs reprises. En 2007, Jean-Louis Borloo a perdu une cinquantaine de sièges à droite à l’Assemblée nationale et a oublié que le gouvernement envisageait de la créer. En 2012, le président du Parti radical a changé son arme et s’est déclaré « très prudent et très réservé » quant à sa création. En 2012, à l’issue du mandat de cinq ans de Nicolas Sarkozy, cela n’a pas empêché l’Assemblée nationale d’adopter la TVA sociale, soit une augmentation de 1,6 point de la TVA. François Hollande avait promis de le retirer après son élection. Cela s’est produit en juillet 2012.
Point : Quelles mesures recommandez-vous pour réindustrialiser la France?
Sylvain Maillard : Depuis 2017, nous stimulons et aidons les industriels à s’implanter sur notre territoire. Nous devons accélérer le mouvement. C’est pourquoi je propose d’introduire l’introduction d’une TVA sociale dans le débat. L’idée est que notre modèle social soit en partie financé par nos importations. L’augmentation de la TVA réduit les coûts de production de nos sociétés en France. Ce levier permettra non seulement de réindustrialiser, mais aussi d’augmenter les salaires et de créer des emplois. Nous entrons dans un cercle vertueux. Cette TVA est une véritable barrière protectrice pour notre industrie.
La TVA sociale est une vieille idée qui fait grincer des dents …
C’est une vraie question, mais je voudrais rouvrir le débat car la France entre dans une nouvelle ère. Vous devez trouver différentes solutions. Le pays a contracté d’importantes dettes au cours de cette période et continuera de le faire. Comment trouver de l’argent et maintenir notre système de protection sociale? La TVA sociale est l’une des réponses possibles. Je suis contre l’augmentation des impôts. Leur augmentation serait une erreur stratégique et un non-sens économique. Pour trouver des marges de manœuvre, il n’est pas surprenant de financer une partie de notre système de protection sociale avec nos importations.
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Faut-il réduire la taxe à la production?
Les entreprises ne se sont pas exilées par plaisir. Si les coûts de production français étaient égaux à ceux de la Hongrie, du Maghreb ou de la Chine, tout le monde en France produirait. Produire à l’étranger n’est pas une fatalité. C’est le résultat d’un énorme écart de concurrence, même si nous avons fait de réelles améliorations depuis 2017.
Le manque de matériel médical a accentué la désindustrialisation française. La situation est-elle désespérée?
Il est à noter que la France a une industrie, mais nous avons des trous dans la raquette. Il est vrai que notre pays a perdu la main dans de nombreux secteurs, et pas seulement dans l’industrie pharmaceutique. Cette crise révèle nos carences industrielles. Ce n’est pas le cas en Allemagne, par exemple.
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Pourquoi l’Allemagne est-elle moins désindustrialisée?
Je dis depuis des années que les industries sont parties parce que les coûts de production en France sont trop élevés. Pour rester en vie et être compétitives, les industriels ont décidé de s’exiler à l’étranger. Depuis les années 2000, il y a eu une fuite dans une politique visant à développer le secteur tertiaire. L’idée était alors que la Chine deviendrait l’usine du monde. La réindustrialisation nécessite de comprendre et de traiter les causes de la maladie.
Ce serait donc une question de politique?
Pas seulement. Les entreprises doivent changer leur culture d’entreprise. En France, on ne chasse pas en meute: les grandes entreprises ne travaillent pas principalement avec les PME de leur territoire. Ils ont mis tout le monde en compétition. Un acheteur d’une grande entreprise française serait plutôt intéressé à acheter à l’étranger, car cela le place comme un cadre international et cela fera avancer sa carrière au sein de son entreprise. C’est une vraie préoccupation.
Y a-t-il d’autres obstacles à supprimer?
Oui: tout le monde veut s’industrialiser, mais personne ne veut une usine Seveso près de chez soi. Nous devons accepter le quartier industriel. Surtout aujourd’hui, de nombreux progrès ont été réalisés dans l’adaptation des usines aux normes écologiques. Nous ne sommes plus au temps de l’industrie Zola.
L’Europe a-t-elle un rôle à jouer?
Bien sûr ! Nous devons pouvoir travailler avec nos partenaires européens pour revoir nos règles en matière de marchés publics. Le critère du lieu de production devrait devenir une condition essentielle de sélection. Notre droit européen de la concurrence est obsolète, ce qui signifie que l’Europe est considérée comme le monde. Par exemple, la Commission européenne a refusé le mariage entre Alstom et Siemens. Le résultat est que le numéro un mondial est un Chinois qui engloutira les entreprises européennes. L’Europe doit se protéger et être moins naïve d’un point de vue industriel et économique. Elle doit favoriser ses entreprises en interne pour qu’elles puissent elles aussi conquérir le monde.
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Emmanuel Macron a dit de se réinventer, est-ce un bon présage économiquement?
Nous sommes confrontés à une crise très profonde que nous traverserons en premier. Après cela, il est nécessaire de convertir la limitation en opportunités. Cela signifie penser à ce que la France veut être et se donner les moyens. Nous voulons redevenir une force industrielle majeure. Nous devons nous donner les moyens.